Petite-fille comblée

Article publié le 13 janvier 2014.

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Il m’avait demandé de ne pas partir…

J’ai besoin d’écrire. Besoin d’écrire parce que ma peine, elle me sort par les oreilles, les veines, les pores, le nez. J’en peux plus de ma peine. Un gros J’EN AI MARRE, bon! Quoique j’en ai autant marre de ma force tranquille, de garder ça en dedans parce que je suis donc’ forte devant les autres, on dirait, tout à coup, de même… Je ne fais même pas exprès, je suis comme ça. J’suis tannée, point.

Pappy dirait que c’est toutes ces petites choses-là qui rendent la vie intéressante, pis je lui répondrais : pouet, pouet en lui faisant claquer une de ses bretelles. Il ne serait pas bien bien content de savoir que je les ai gardées ses bretelles, qu’hier soir elles se sont logées sous mon oreiller et que je les tournicotais autour de mon index pour m’endormir. Comme ça, par hasard, tsé…

Petite-fille comblée

Petite-fille comblée

 

Tantôt, quand je cherchais des papiers dans sa chambre, j’ai levé la tête et j’ai aperçu l’un des premiers cadeaux que je lui avais achetés, une grosse boule d’émotions dans ma gorge a failli m’étouffer. Une chance que ma grand-mère était juste à côté de moi, je me suis vite ressaisie… Imaginez-vous donc que c’est un vide-poche en globe terrestre, ce cadeau. Je n’avais jamais réalisé que je pensais déjà aux voyages à cet âge-là…

Un de mes souvenirs les plus précieux est sans doute quand j’ai annoncé à mes grands-parents que je partais en sac à dos à travers l’Europe seule pendant deux mois. Pappy ne voulait rien savoir. Il m’a demandé combien me coûterait ce voyage et quand je lui ai indiqué le prix, il m’en a offert le double pour rester au Québec. Tête de cochon comme je suis, j’ai refusé et j’ai vu ça comme un défi, mais je peux vous dire qu’il n’en menait pas large. Je me suis toutefois fait un devoir de l’appeler régulièrement et de lui envoyer une tonne de cartes postales, histoire de le rassurer. À mon retour, il m’a dit tout gêné qu’il était content, finalement, que j’y sois allée quand même, qu’il était fier de moi, qu’il me trouvait très courageuse. Je l’ai souvent racontée celle-là.

Une séance de Lucie Bataille Photographie avec mes grands-parents

Une séance de Lucie Bataille Photographie avec mes grands-parents

 

C’est resté une anecdote entre nous, il m’en a souvent reparlé. Quand je lui ai annoncé que je partais en tour du monde, on ne peut pas dire qu’il était heureux de me voir partir si longtemps, mais il a tout de suite compris ma passion et m’a encouragée malgré quelques questions pour soulager son inquiétude. Il m’a fait promettre de revenir vite et il m’a dit bien des fois à mon retour qu’il avait trouvé ça trop long. Maintenant qu’il est parti, seulement 2 mois et demi plus tard, je me dis dans ma tête de petite-fille qu’il m’attendait peut-être…

Avant de partir sur la route, au quotidien ou au retour, n’oubliez pas de dire à ceux que vous aimez combien ils sont importants pour vous. Si vous n’en êtes pas capable de vive voix, faites-le par écrit, par vidéo, par courriel, peu importe, mais faites-le. Je sais qu’il est parti en sachant tout l’amour que j’avais pour lui, et ça, c’est tellement important.

Merci, Pappy, d’avoir été l’homme que tu as été! Je t’aimerai toujours!

 

*Merci aussi à Lucie Bataille pour les superbes photos que nous conservons tous en souvenir près de notre coeur.

 

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33 commentaires

  • Commenter
    Audrey
    13 janvier 2014 à 05 h 35

    C’est un très joli message… Je suis très émue. Courage.

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    Lily@EnTerreAndine
    13 janvier 2014 à 05 h 37

    Ton article m’a particulièrement touché car mes deux grand-pères sont décédés alors que j’étais en voyage. Papy Maurice en juillet 2011, seulement un mois avant que je rentre de mes 9 mois en Asie ; Papy Marcel il y a un mois.
    Vivre son deuil à distance et loin des siens est extrêmement difficile, même si vous ce deuxième décès était programmé. Il m’avait d’ailleurs dit en nous quittant en août dernier : “je ne serais plus là quand tu reviendras”. Je savais qu’il avait raison, et je l’ai simplement serré une dernière fois dans mes bras.
    Tu auras eu la chance d’avoir eu deux mois pour profiter de lui : je t’envoie mes plus belles pensées, dans ce moment où un bout de notre enfance s’en est allée…

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      Jennifer Doré Dallas
      13 janvier 2014 à 05 h 54

      Oh, comme j’aurais trouvé ça difficile être loin quand c’est arrivé. Je suis contente que mon 6e sens m’ait dit qu’il était temps de revenir, j’ai pu le revoir en forme avant qu’il ne soit malade. Courage à toi aussi pour les émotions, les hauts et les bas!

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    Blog voyage Découverte monde
    13 janvier 2014 à 06 h 54

    oufff Jennifer cet article est très touchant. C’est toujours un peu la crainte que nous avons quand nous partons à l’étranger. Qu’il arrive quelque chose aux gens qu’on aime pendant notre absence. Tu l’auras jamais si bien dit… nous devons le dire aux gens que nous aimons, mais pas juste avant de partir. En tout temps…
    Encore une fois, mes plus sincères condoléances à toi et ta famille. Papy veille sur toi maintenant.

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    The Green Geekette
    14 janvier 2014 à 10 h 37

    <3 je sais combien c'est dur d'être séparé des siens (et c'est pour ça que je sais que je ne pourrai pas passer ma vie au Canada) alors je comprends tout à fait ce que tu ressens. Des fois quand ça ne va pas, je n'ai qu'une envie, rentrer chez moi pour profiter d'eux, et c'est dur parfois de faire le choix d'être un peu "égoiste" et de vivre pour moi, de vivre à l'étranger, de voyager, même si cela veut dire être loin d'eux… Courage!

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      Jennifer Doré Dallas
      14 janvier 2014 à 11 h 15

      On est souvent déchiré entre les deux réalités, hein? C’était la même chose pour moi pour ce voyage, mais dans le fond, ceux qui nous aiment veulent notre bien et sont donc capables de comprendre notre passion. C’est plutôt à l’intérieur que le tiraillement se fait! 😉

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    Linda Bibb
    14 janvier 2014 à 02 h 25

    Ma mère a 88 ans et vit au loin, dans une maison de retraite. Parce que je vis à l’étranger, je chéris chaque moment que je peux partager avec elle. Mes visites sont Bittersweet parce que quand je l’embrasse au revoir, je ne sais jamais si ce sera la dernière fois que je la vois.

    Chaque fois que je visite, ses amis me traitent comme si j’étais une célébrité: “Est-ce que votre fille, qui peut se rendre partout dans le monde?” Je sais qu’elle me manque, mais c’est une joie de l’entendre dire: «Vous êtes tellement chanceux de voyager autant!”

    Mes plus sincères condoléances à vous. Je suis heureux que vous aviez du temps avec lui avant sa mort.

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      Jennifer Doré Dallas
      14 janvier 2014 à 02 h 46

      Wow, Linda! Your French is amazing! 😉 Thanks for your kind words, and yes, we have to cherish those we have while they are with us.

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    annick
    26 janvier 2014 à 01 h 15

    je pense à toi en ces temps difficiles

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    Christiane Francisco
    30 janvier 2014 à 07 h 41

    Tu sais, je t’envie d’avoir eu la chance de connaitre ton grand père. Je n’ai pas eu cette chance, mes parents étaient jeunes quand ils ont perdu leurs parents…Et la photo avec tes grand parents est juste magnifique!

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    Marie-Pier Daoust
    9 février 2014 à 08 h 51

    Je suis très émue et sans mot ma belle Jennifer

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      Jennifer Doré Dallas
      9 février 2014 à 09 h 14

      Merci Marie-Pier. C’était une bonne personne. En espérant qu’il me voit de là haut 🙂

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    Lise Jacquemin
    16 février 2014 à 01 h 51

    En ce dimanche après-midi frisquet, je viens glaner sur le net en cherchant des écrits de voyage. Je viens de vous découvrir et par hasard, le premier article que j’ai lu c’est : ”Il m’avait demandé de ne pas partir”… Oh boy ! Vous m’avez pogné au cœur belle madame parce que je vous crois sincère. J’aime votre façon d’écrire et je serai une lectrice assidue. Je suis maintenant abonnée à vos écrits. Merci.

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      Jennifer Doré Dallas
      16 février 2014 à 02 h 31

      Quels bons mots en ce dimanche Lise, merci beaucoup, ça fait plaisir à lire et chaud au coeur! N’hésitez pas à toujours me donner votre rétroaction! Bonne lecture!

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    26 mars 2014 à 04 h 49

    […] retour a été chamboulé par la maladie de mon grand-père et son décès et j’ai passé beaucoup de temps auprès de ma famille. La fin de 2013, les Fêtes et le mois de […]

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    Jennifer
    13 avril 2014 à 03 h 16

    Déjà plus de trois mois… Parfois, j’oublie que tu n’es plus là, que tu ne seras plus jamais au bout du fil, que je ne tirerai plus jamais les bretelles… Parfois, aussi, mes yeux s’embuent quand je croise le pappy de quelqu’un d’autre, un vieil homme dans la rue, j’ai envie d’aller dire aux petits-enfants qui l’accompagnent de le chérir, d’en profiter.

    Parfois, je me dis que j’ai eu une chance inouie de t’avoir dans ma vie jusqu’à 29 ans, alors que d’autres ne connaissent même pas leurs grands-parents.

    Parfois…
    Mais toujours, je t’aime et tu me manques!

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    Christiane Francisco
    13 avril 2014 à 05 h 48

    Jennifer, la perte d’un être cher n’est jamais facile. Mais tu as eu la chance de connaitre ton grand père. Si tu savait comment je t’envie, car je n’ai jamais eu cette chance avec mes grands parents…

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    28 juillet 2017 à 10 h 56

    Votre relation avait l’air toute belle. C’est un bel hommage que tu lui rends avec cet article.
    Mon grand-père à moi est décédé bien avant que je m’expatrie et pourtant il est parti lorsque j’étais en vacances au Mexique, un séjour de deux semaines seulement… Toi il a attendu ton retour et moi il a profité que je m’en aille pour ne pas le voir souffrir… Bon courage Jennifer dans cette épreuve qui n’est jamais facile.

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    celine
    10 janvier 2019 à 03 h 46

    Très beau message d’amour d’une petite fille vers son papy <3
    Merci de partager ta peine avec nous dans ce beau texte. Etre adulte c'est faire des choix pour nous. Difficiles parfois pour ceux qui nous entourent, même si ils savent que ces choix sont les bons pour nous.
    Le bonheur est désormais de savoir que n'importe où sur cette terre tu te trouveras, ton papy sera là avec toi, profondément ancré dans ton coeur.

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