Pour qui n’a pas eu la chance de voyager en Asie, Un été d’amour et de cendres constitue une belle porte d’entrée sur la réalité tibétaine et indienne. Ce roman de l’écrivaine Aline Apostolska nous plonge dans l’expérience d’une jeune adolescente, Emma, constamment trimbalée aux quatre coins de la planète par ses parents enseignants férus de coopération internationale.
Inspiré de faits réels que l’auteure a vécus dans la communauté de Dharamsala en 1997, le récit, où une première histoire d’amour dramatique constitue le grand filon conducteur, introduit d’abord le lecteur à ce qui particularise tant l’Inde chaotique : au côté de la jeune fille, on se familiarise d’abord avec les systèmes de castes, à la mousson, aux rituels religieux et aux cérémonies crématoires. On franchit le pas de l’Inde touristique et aux saris colorés pour découvrir dans les terres profondes une Inde miséreuse et profondément grise. Au-delà du simple témoignage, l’auteur dénonce :
« En Inde, la vie humaine semble souvent peu de chose. Il faut se soumettre à ce qu’elle est, telle qu’elle est : honorable, agréable ou innommable, vous l’avez méritée pas question de la remettre en question, c’est la loi immuable du karma, un système de contrôle social travesti en foi ».
Puis, la vision de l’adolescente permet d’ouvrir un autre regard sur une enclave tibétaine du nord de l’Inde. C’est au cœur d’une communauté d’orphelins qu’on en apprend davantage sur le passé des Tibétains, jadis peuple de guerriers, sur la haine les reliant aux Indiens, sur les revers du « middle way » pratiqué par le Dalaï-Lama et sur ses dissidents.
Au côté de la jeune fille on se fait témoin, découvrant l’Hindouisme et les rites et lieux de crémation sur le Gange, on se questionne sur notre vision du bouddhisme, sur la charité purement chrétienne de Mère Teresa à Calcutta, mais surtout on déconstruit notre vision occidentale par moment bien partielle et idyllique…
Le récit se veut aussi une méditation sur le voyage et le déracinement :
Les longs voyages ferroviaires ont pour effet particulier de diluer les émotions, heureuses ou malheureuses, de les effilocher jusqu’à ce que l’on n’en retienne que l’essentiel, que la substantifique expression.
À l’heure où l’on entend tristement parler de plus en plus des immolations qui y ont pourtant lieu depuis maintes années, ce roman se veut absolument d’actualité. Bien qu’il s’adresse aux jeunes adultes, on le retrouve dans les sections jeunesse; il constitue une riche et profonde porte d’entrée à la réalité indienne et tibétaine. Du moins, un premier bon apprivoisement…
À dévorer.
Marie-Eve Blanchard
mawoui.com
7 commentaires
Elizabeth
14 décembre 2012 à 07 h 04Délicieux roman et quelle surprise de trouver ce matin cette chronique de ma belle Marie, un pur hasard! Vive les hasards, hein Marie! Beau travail en passant, tu me donne le goût de le relire!!! hihi
xx
Elizabeth
(Rouyn-Noranda)
Jennifer
14 décembre 2012 à 09 h 58On aime ça! 🙂
Aline Apostolska
15 décembre 2012 à 11 h 41Je suis si chanceuse ! Magnifique critique Marie, merci merci merci !!!
Jennifer
15 décembre 2012 à 10 h 00Quel honneur de lire un commentaire de l’auteure!
Marie Turgeon
16 décembre 2012 à 09 h 45Merci Marie-Eve pour la belle critique, ça donne le goût de lire ce livre. Un autre titre à ajouter à ma liste de lecture.
Et en passant ce livre fait parti de la liste des « 50 livres de 2012 » du journal La Presse. Toutes mes félicitations à l’autueur!
Aline Apostolska
16 décembre 2012 à 11 h 54Oui je suis TRÈS contente !!! Et ne croyez pas qu’ils sont complaisants parce que ce sont mes collègues, parce que ce n’est vraiment pas le cas, bien au contraire !
Catherine B.
18 décembre 2012 à 05 h 28Grand merci pour la suggestion! Avide de lecture, je suis toujours en recherche de nouveaux titres intéressants. Je suis certaine que je vais aimer celui-ci, je le mets sur ma liste! 🙂